La monarchie, l'ancien système modernisé.

*Pour éviter toute confusion, les fonctions sont mises au masculin mais peuvent aussi se traduire au féminin selon le pays concerné. Donc, si je dis Roi, je peux aussi dire Reine.

 

En ce jour du 25 octobre 2019, la Belgique fête les 18 ans de la future reine Elizabeth, âge légale pour pouvoir monter sur le trône sans l’assistance d’un ou d’une régente. Ouf, pas de débat pour savoir qui dirigerait (symbolique) le pays en CDD.

 

La monarchie, ce système politique imaginé comme la domination d’une élite aristocratique possédant l’ensemble des richesses du pays, faisant des party nights tous les jours pendant que le reste de la population vit dans la pauvreté. Certes, c’est exagéré mais ceci est l’image qu’utilisent les républicains pour justifier l’instauration d’une république.

 

Monarchie vs république, un débat houleux dont le dernier écho fut l’instauration de la république fédérale au Népal en 2008 lorsque le Roi fut prié d’abdiquer. Et dire que le fédéralisme n’est toujours pas achevé 11 ans après sa proclamation, certaines rumeurs évoquent même le retour hypothétique de la monarchie. Affaire à suivre.

 

En attendant, revenons sur la monarchie.

 

Je suis l’élu, tu le seras aussi

 

Donner une définition universelle de la monarchie est devenue difficile car son concept a évolué avec le temps. Pour simplifier, il s’agit d’un système politique dont le chef de l’Etat porte un titre autre que Président (Roi, Empereur, Emir, Sultan, Grand-Duc, Prince, Pape).

 

Autrefois, le souverain se distinguait du président par les modalités de l’accession au pouvoir. Dans la grande majorité des cas, il s’agit d’une famille reconnue comme dynastie où le mandat du souverain prend fin avec le décès ou l’abdication. Cependant, la frontière est floue car certaines républiques appliquent aussi la transition dynastique (Corée du Nord, Syrie, Azerbaïdjan, peut-être la Biélorussie). La principale différence est que la monarchie a codifié ce principe, pas la république où il s’agit plutôt d’une pratique familiale pour conserver le pouvoir.

 

En Malaisie et au Vatican, la monarchie n’est pas dynastique mais élective car le souverain est élu selon des règles.

 

Pour le cas malaisien, le Roi est l’un des 9 souverains (8 Sultans et un Raj) choisi tous les 5 ans selon un ordre cyclique (comme le Conseil européen de l’UE avec la présidence tournante) pour assurer le rôle de chef de l’Etat.

 

Concernant le Vatican, le souverain exerce sa fonction jusqu’à sa mort ou son abdication puis, après la vacance du trône où celui-ci reste vide, les cardinaux se réunissent pour élire un nouveau pape à la majorité de 2/3. Une fois élu, le nouveau souverain pontife choisit un prénom chrétien et le portera à vie.

 

Et le peuple dans tout ça ? Ne pas choisir son chef est antidémocratique selon les républicains. Qui vous a dit qu’une république est toujours démocratique ? Comme cité plus haut, il n’y a pas de définition universelle pour la monarchie, il n’y en a pas non plus pour les systèmes républicains.

 

Le Président peut-être élu via un suffrage indirect où ce sont les élus politiques et non les citoyens qui le nomment via un vote ou un consensus entre partis. Cela est souvent le cas pour les présidences symboliques où le pouvoir est exercé par le chef du gouvernement et non de l’Etat. Citons par exemple l’Allemagne, l’Italie, la Grèce, Israël et l’Ethiopie.

 

Et que dire des présidents arrivés au pouvoir par un coup d’Etat militaire ou politique ? Croyez-vous qu’ils aient demandé l’avis du peuple pour occuper la fonction suprême ? Ceux qui y sont opposés ne sont plus là pour dire leur avis.

 

La vieille tradition qui perdure

 

La monarchie donne une image vieillotte dans un monde réclamant davantage de liberté et de démocratie. Et pourtant, la grande majorité des familles régnantes a encore de beaux jours devant elles. Techniquement, elles sont sur une chaise éjectable car, du jour au lendemain, le gouvernement et les élus parlementaires peuvent décider de proclamer la république.

 

En Belgique, cela impliquerait la révision des articles de la Constitution concernant le Royaume et la famille royale. Or, la procédure est très contraignante car il faut l’accord des majorités francophone et néerlandophone de la Chambre des Représentants. Cela signifie que même si la NVA et le Vlaams Belang deviennent majoritaire dans la partie néerlandophone, ils ne pourront pas proclamer la république tant que les francophones s’y opposeront. A moins d’un coup d’Etat, seul un consensus peut aboutir à la république. Et quelle république ? Une république à la libanaise où chaque communauté se partage un rôle primordial de l’Etat ? Bonjour les débats ! Non, dans le cas belge, mieux vaut garder une monarchie qui fonctionne qu’une république boiteuse sur fond de divisions communautaires.

 

D’autant que la famille royale n’est pas toujours honnie par la population. Ce n’est plus le temps du souverain régnant sur des centaines de millier de paysans qui n’avaient jamais vu son visage sauf sur des pièces de monnaie. La société a évolué, l’image de la dynastie aussi. En effet, le Roi doit faire preuve de communication pour montrer qu’il est proche du peuple, qu’il est ouvert et attentif à la situation de son pays. Même si certains pays vénèrent leur souverain par tradition (comme le Maroc et la Thaïlande), pour d’autres les scandales peuvent raviver les appels à la république comme en Espagne.

 

Enfin, la monarchie n’est pas incompatible avec la démocratie. Dans la grande majorité des cas européens, les souverains occupent une fonction symbolique où c’est le pouvoir civil qui gère les affaires de l’Etat. Ce régime est qualifié de monarchie constitutionnelle où les pouvoirs du Roi sont limités par la Loi, par opposition à la monarchie absolue. Même s’il conserve certaines prérogatives comme l’orientation dans la formation d’un futur gouvernement et le droit de grâce, sa vocation première reste l’incarnation symbolique de l’unité du pays. Dire qu’il est inutile est donc un mensonge, il occupe une place que les acteurs politiques considèrent comme la sienne.

 

La monarchie, un concept moyenâgeux dépassé ?

 

L’image du souverain à la tête couronnée assis à longueur de journée sur son trône avec buffet à volonté et la trésorerie remplie est encore tenace, elle est pourtant dépassée. En réalité, chaque roi est soumis aux restrictions qu’imposent la loi et les dirigeants politiques. Même dans les monarchies absolues, les souverains sont tenus de respecter les décisions politiques lorsqu’ils essuient un refus catégorique. Les intérêts de l’Etat passent toujours devant ceux du monarque, et gare à lui s’il ne respecte pas la consigne, il ne faut jamais mordre la main qui le nourrit.

 

Si la monarchie existe encore, c’est qu’il y a un intérêt derrière. Gage de stabilité et maintien d’un symbole important pour le gouvernement, popularité et représentativité (ou manque d’alternative) pour les citoyens, il n’y a aucune raison de passer du jour au lendemain de la monarchie à la république.

 

 

Chaque Etat est libre de choisir son régime et changera lorsque la nécessité ou l’opportunisme de profiteurs de feront sentir. En attendant ce bouleversement : longue vie au Roi !