Leçon d'écologie : comment recycler les électeurs?

Le climat, l’environnement, l’écologie, la protection de la nature, la lutte contre le réchauffement climatique. A moins de vivre reclus dans une grotte polaire, vous avez entendu ces thèmes revenir à la une de l’actualité. Et pour cause : la jeunesse se réveille, pas seulement en Belgique, pour réclamer plus d’actions et de décisions en faveur de notre bonne chère planète bleue virant au gris au fil des années.

 

Greta Thunberg, ce nom vous dit quelque chose ? Eh bien, vous risquerez de l’entendre encore car cette adolescente suédoise est devenue une icône pour la protection de l’environnement grâce à sa volonté de secouer les politiques pour leur faire comprendre qu’il serait temps d’intercaler dans leur programme la question climatique.

 

Et la Belgique dans tout ça ? Chez nous, ce n’est pas une mais des milliers d’adolescents et d’enfants qui se mobilisent chaque jeudi pour manifester en faveur du climat. A l’approche des élections, nulle question de faire la sourde oreille, les partis politiques ont compris qu’il était temps de se pencher sur cette thématique. Trop même.

 

Un agenda plus vert que vert

 

Qui dit manifestation phénoménale dit modification électorale. Souvent relégué au rang de préoccupation secondaire au profit de l’économie et de l’emploi, l’environnement est soudainement devenu le principal enjeu électoral.

 

Les enchères sont ouvertes. Taxer les carburants ! Plus d’énergie verte ! Qui dit mieux ? Fini les voitures diesel dans les grandes villes ? Et quoi encore ? Taxer les trajets en avion ! Vous en voulez encore ? Quoi ? Fini le nucléaire ? Désolé, ça a déjà été proposé et regardez où nous en sommes !

 

Tout comme les électeurs, les programmes de parti sont volatiles selon l’actualité. Il est facile de modifier celui-ci à travers les grands discours et les propositions chocs dont la moitié ne sera même pas évoquée durant les négociations. Pourquoi un tel acharnement soudain sur cette matière ? Comment ? Les écologistes deviendraient la première formation politique du pays ? Ah, là ! Nous comprenons mieux cette engouement subit. Quitte à ne pas être aux manettes des prochains gouvernements, autant être dans l’une des locomotives.

 

En attendant, les partis tentent de montrer qu’ils ont déjà la fibre écologique à travers un texte législatif, cette fameuse loi climat où la Belgique souhaite montrer le bon exemple en s’engageant dans la réduction des gaz à effet de serre (nous parlons de 65% d’ici 2030 !). Il y a cependant un hic dans tout ça : il s’agit d’une loi spéciale, ce qui signifie que la majorité est requise dans les deux groupes linguistiques. Or, aucune majorité flamande ne s’est dégagée pour adopter le texte tel quel. Cela promet de longs débats houleux sur fond de crise communautaire.

 

Car tous les partis ne sont pas sensibles à la fibre écologique. La NVA, par exemple, considère cette mesure comme une remise en cause de la société et du coup, chacun devra changer son mode de vie. Entendez cela : les Flamands devront vivre comme les Wallons selon la NVA. Dans l’austérité et la pauvreté… Au lieu de suivre la tendance, la NVA préfère exploiter l’autre filon électoral : l’immigration.

 

Comment recycler des personnes en voix ?

 

L’immigration, thématique en vogue à l’approche des européennes, reste la marque de fabrique des partis d’extrême droite, nationalistes et conservateurs. Leur mot d’ordre : terrifier le peuple en invoquant la menace extérieure comme principal facteur des difficultés en interne. Traduction : c’est pas de notre faute, c’est celle des autres.

 

Lorsqu’est apparue la crise migratoire, les différents gouvernements se sont retrouvées face à un défi dont ni leurs mesures, ni les dispositifs, ni les accords européens (dont le fameux Traité de Dublin) n’ont permis d’y apporter une solution. Il ne fut jamais envisagé une vague migratoire d’une telle ampleur et à chaque fois que la solidarité européenne est engagée, c’est le chacun pour soit qui se dégage. Sans politique efficace, une autre solution existe pour sauver les meubles (ou devrais-je dire, les sièges) : la carte de l’immigration aux élections.

 

Oubliez l’économie qui dérape et les emplois qui diminuent en quantité et en qualité, songez plutôt aux migrants qui viennent dérober le peu qu’ils nous restent. Cela parait simplet comme raisonnement et pourtant, cela fonctionne. C’est l’un des principes de la propagande : ne tentez pas de raisonner votre cible, attaquez-la sur le plan émotionnel. Faites-lui miroiter un monde parfait dont vous seul avez la recette pour le rendre réalité.

 

Rendez-vous avec l’actualité

 

Selon vous, quel est le point commun entre l’immigration et l’écologie ? Aucun ?

 

Il y en a un : ce sont des dossiers phares pour certains partis récupérés par les autres si les médias en font un dossier important.

 

Les partis agissent comme des girouettes en suivant le vent médiatique car il est dans leur intérêt de répondre aux préoccupations des citoyens pour ensuite traduire ces attentes en voix. Et quoi de mieux que de surfer sur la vague des migrants lorsque les flux ont soudainement augmenté ou l’écologie lorsque les étudiants manifestent pour le climat.

 

Prenez donc ceci comme une mise en garde. Ne croyez pas que les partis se préoccupent vraiment de notre planète sinon les étudiants seraient encore assis sur les bancs d’école et d’université. Ne soyez pas étonnés si du jour au lendemain vous n’entendrez plus parler de revendications pour un meilleur respect envers notre planète.

 

Idem pour l’immigration. Les médias en parlent de moins en moins, le flux en Belgique a diminué pour retrouver la moyenne annuelle.

 

Quant aux résultats, je vous donne rendez-vous en mai, afin de découvrir si les revendications se traduiront en véritable avancées. En attendant, les candidats continueront de nous pomper l’air avec leurs promesses.

 

Sources :

 

 

MACHEREL Cathy, Le traité de Dublin ? Il craquelle de partout, Tribune de Genève, 24 juin 2015, https://www.tdg.ch/monde/traite-dublin-craquelle-partout/story/12101647